Pneu crevé

Les ruelles du centre historique d’Arlon, charmantes au demeurant, recèlent quelques pièges pour la conduite : pavés irréguliers, petites côtes raides, angles aigus, bordures élevées. Autant de raisons de ralentir, et de prendre la vie comme elle vient, dès potron-minet. N’empêche que, conjugués, et dans la hâte, les deux derniers sont une voie royale vers le pneu crevé…

En l’occurrence, un mardi matin à 7h25, le presque inévitable (un geste brusque…) arriva.

En quelques secondes, le plan de la journée s’écroule, l’horizon se noircit, le vocabulaire se colore, et le courage s’épuise déjà devant les perspectives d’une session de bricolage en plein air.

Il faut d’abord trouver une place de stationnement dans ce dédale moyenâgeux, et supporter dans le même temps la pensée d’un pneu qui se gâche dans le mouvement, puis espérer que les outils se trouvent bien dans le coffre, et enfin prendre le taureau par les cornes.

Tant pis pour le pantalon clair et l’élégance, c’est parti.

Pas pour longtemps. Sur son cheval blanc, le chevalier s’approcha, les bras ouverts, traversant sans hésitation la brume matinale… Bon, à peu de choses près !  

Il a la cinquantaine bien sonnée, un véhicule break rouge poussiéreux, des manches relevées sur des avant-bras rugueux, et l’allant de celui qui va faire ce qu’on lui a désigné comme son devoir.  Si, il a le temps, il est en congé. Non, ce n’est pas trop tôt, il a déjà déposé son fils à l’école. Évidemment, qu’il va tout faire, ça ne va lui prendre que quelques minutes. Aucun problème, madame, enfin !

Agenouillé sur le bitume, il montre, dévisse, saisit, déplace, conseille, revisse, puis se relève, satisfait et souriant. En quelques minutes, en effet.

Il repart en riant, ni méprisant ni moqueur, juste joyeux. Tiens, la brume s’est dissipée.

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